Jetez sur une étoile un rapide coup d’oeil, regardez-la obliquement, en tournant vers elle la partie latérale de la rétine (beaucoup plus sensible à une lumière faible que la partie centrale), et vous verrez l’étoile distinctement ; vous aurez l’appréciation la plus juste de son éclat, éclat qui s’obscurcit à proportion que vous dirigez votre vue en plein sur elle. Dans le dernier cas, il tombe sur l’oeil un plus grand nombre de rayons ; mais dans le premier, il y a une réceptibilité plus complète, une susceptibilité beaucoup plus vive. Une profondeur outrée affaiblit la pensée et la rend perplexe ; et il est possible de faire disparaître Vénus elle-même du firmament par une attention trop soutenue, trop concentrée, trop directe.
Edgar Allan Poe, Histoires extraordinaires
Traduction de Charles Baudelaire
« … les État-Unis ne furent pour Poe qu’une vaste prison qu’il parcourait avec l’agitation fiévreuse d’un être fait pour respirer dans un monde plus aromal… » (Charles Baudelaire. Edgar Poe, sa vie et ses oeuvres)